La maison aux vingt mille légendes

Publié le par Laurette

La Maison, Roberto Innocenti, J. Patrick Lewis, 2010 -

La maison aux vingt mille légendes

Voilà un album au procédé très intéressant qui nous permet de traverser un bout de la grande Histoire à travers la petite histoire d’une maison et de ses habitants au fil du vingtième siècle.

Le narrateur est la maison, née en 1656, elle nous raconte alors qu’elle a connu une première vie avant d’être laissée à l’abandon pendant très longtemps.

J’ai vu des familles grandir, j’ai vu tomber des arbres. J’ai entendu des rires et le son du canon. J’ai connu des tempêtes, des marteaux et des scies, et enfin d’abandon.

Puis, en 1900, une seconde vie s’annonce, sous le regard émerveillé de quelques enfants venus chercher en forêt des champignons et des châtaignes. « Regardez ! La maison aux vingt mille légendes. » Enfin, les hommes la redécouvrent, s’intéressent à nouveau à elle et vont lui donner une nouvelle jeunesse, réparant son toit, renforçant ses murs, nettoyant son jardin.

1900, 1901, 1905, 1915, 1916, Et au fil des pages, l’histoire se tricote, la vie revient dans cette demeure, de nouveaux arbres sont plantés, des mariages sont célébrés, des naissances s’annoncent, des fêtes de famille sont organisées. A nouveau des rires d’enfants, de la musique, des récoltes.

La maison aux vingt mille légendes

1918, 1936, 1943, 1944, la maison devient le témoin muet de quelques années noires, faites de larmes, de départs sans retour, d’arrestations, de famine, de désespoir.

1945, vient le temps du répit, de la libération, de la vie, à nouveau…

La maison aux vingt mille légendes

1967, année terrible pour la maison, pour la maîtresse des lieux, la dernière heure à sonné ….

Que les adieux sur moi tombent comme des pleurs : le décès de la veuve est mon funèbre automne, sans cœur, une maison ressemble à une fleur dépourvue de rosée. Doucement le glas sonne.

A nouveau la maison est abandonnée à son sort, et restera des dizaines d’année ainsi, à se délabrer, sous le regard doucement mélancolique de quelques promeneurs.

La moisissure est mon maître, après ces vingt ans. De la solitude je suis prisonnière, envahie d’animaux, exposée à tous vents, mes pierres effondrées s’enfoncent dans la terre.

Qui sera entendre l’appel de cette maison « aux vingt mille légendes » ?

Elle renaîtra cette maison, mais, hélas, ne sera jamais plus la même, sacrifiée sur l'hôtel de la modernité, du conformisme, de la sur-consommation.

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Un splendide ouvrage !!! Une lecture apaisante, touchante, intime.

Un texte de toute beauté, délicat, riche, savoureux, accompagnant parfaitement les merveilleuses illustrations qui savent si bien donner vie aux ambiances, aux émotions, aux évènements.

Une fabuleuse idée pour parler d’histoire, la grande et les petites, et qui nous invite à nous poser et réfléchir à la vie, celle dans laquelle nous ne faisons que passer, aux petites graines que l’on laisse parfois et qui germent bien après nous.

Un album enfin qui évoque la mémoire des lieux, ceux qui nous survivront et qui savent presque tout de nous, ceux que l’on est parfois contraint d’abandonner pour que d’autres histoires puissent s’y vivre.

Voilà encore une splendide découverte que je dois à Blandine,voir par là CLIC.

Vous pouvez aussi découvrir La petite fille en rouge, du même illustrateur, CLIC.

Un album lu et chroniqué dans le cadre du challenge "Je lis aussi des albums" 2016 - lecture 33/60. 

A très vite chers lecteurs,

Laurette

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B
Comme j'aime cet album <3 (Merci pour le partage ;-) )<br /> Tu trouves la fin triste? C'est une nouvelle vie, une nouvelle conception qui cache le passé sous un enduit bien lisse, qui cloisonne aussi, mais qui repose sur un passé solide. Ton ressenti est intéressant.<br /> Bises
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B
il n'en restait plus grand-chose mais tu n'as pas tort. il y a des gens qui se passionnent pour la réfection d'une maison dans son ensemble. <br /> et même pour l'histoire des gens qui ont pu y vivre...<br /> le but de l'album était certainement d'accentuer davantage sur le temps qui passe et les changements inhérents. et non sur les sentiments de la nouvelle famille...
L
Oui, d'un sens je trouve ça assez triste ... l'histoire de cette maison ne semble pas avoir de sens pour cette nouvelle famille qui y a surtout trouvé un terrain adapté à de nouvelles envies ... je fais un peu la nostalgique là ;-), mais je trouve que si l'on veut du moderne autant faire construire que de dénaturer ainsi le charme de l'ancien.