Babayaga, symbole slave

Publié le par Laurette

Un autre samedi de challenge, de nouveaux albums, et une nouvelle chronique croisée avec Blandine sur de nouveaux personnages effrayants car Halloween s'approche désormais à grands pas .... quel plaisir de se retrouver ... La semaine dernière je vous présentais la Befana, je reviens aujourd'hui avec plusieurs albums mais une seule vedette de la littérature enfantine, issue des contes traditionnels ... LA BABAYAGA !!!

Pas tout à fait une sorcière, plutôt une ogresse même si sorcières et ogresses c'est un peu le même combat, et le même repas surtout ... de la bonne chaire fraiche et tendre d'enfant ... !

Babayaga, symbole slave

Un peu d'histoire ...

(La) Babayaga est une figure emblématique présente dans l'univers des contes russes (ou polonais), en général.

Des contes édités pour la ou l'une des premières fois par Alexandre Afanassiev, fin du XIXè siècle, à partir d'archives. Il aurait rassemblé ainsi et édité plus de 600 contes, probablement la collection la plus conséquente connue à ce jour.

C'est ainsi que l'on peut trouver ce personnage (tantôt ogresse, tantôt sorcière) dans une multitude de versions différentes... de nom propre, elle passe presque au statut de nom commun dans ces pays.

Elle est avant tout un symbole.

Babayaga, symbole slave

Elle peut porter divers visages mais il est assez commun d'en faire une femme, vieille, laide, solitaire/sauvage, unijambiste et cannibale (dévorant principalement les enfants).

Babayaga, symbole slave

Elle vit au fond de la forêt, dans une isba (habitation de bois, sorte de cabane), posée sur des pattes de poulet, de sorte qu'elle tourne sur elle même, et entourée d'une barrière d'os et de crânes humains.

Babayaga, symbole slave

Il semble aussi assez commun de la voir voler dans un mortier, tenant à la main un pilon, pour, dit-on, écraser la destinée humaine, et un balais pour effacer les traces de son passage.

J'apprécie beaucoup la richesse de ce conte très complet : la mort de la mère, le remariage, la belle mère, la fillette confrontée à ses peurs. Une forêt profonde où l'on peut se perdre, la peur de ne pas revoir ses parents. La peur de l'inconnu, cet adulte inquiétant de mauvaise réputation, des animaux sauvages, des épreuves à surmonter, puis de la dévoration ...

On est là face un conte qui répond bien aux exigences du genre ... permettre aux enfants de matérialiser leurs peurs les plus instinctives, abstraites, inconscientes et violentes parfois mais à distance, par l'intermédiaire de l'histoire, du héros, les affronter et y trouver comme lui/elle, un moyen de les combattre.

Challenge "Je lis aussi des albums" - lecture 79/100 - très belle leccture -

Baba Yaga, Nathalie Parrain, Nadiejda Teffi, traduit par Françoise Morvan, Editions MeMo, 2010

Babayaga, symbole slave

Je choisit cette version pour commencer, qui me semble, à l'heure actuelle, dans la littérature enfantine, la plus proche du conte collecté.

Elle est sortie en 2010, mais reprend, semble t-il, le plus fidèlement possible une adaptation russe sortie en 1932 chez Flammarion.

Le texte, traduit bien sûr, est très légèrement arrangé (indiqué dans les notes de la traductrice à la fin de l'album) mais d'origine tout comme les illustrations, gardées à l'identique.

Pour l'histoire ...

Il était une fois,... une jeune fille, qui n'est pas nommée.

Après la mort de sa mère, son vieux père prend une nouvelle épouse, une marâtre, qui, comme c'est souvent le cas déteste la fillette.

Elle l'envoi chez sa sœur, chercher du fil et une aiguille pour coudre une chemise.

La fillette sentant le piège se méfie et va voir sa tante qui la met en garde et lui donne nourriture et objets aux pouvoirs magiques, censés l'aider à rentrer saine et sauve.

Elle part donc en forêt, se retrouve devant la petite Isba de la Baba Yaga-carabosse-jambe-d'os.

Comme on peut s'y attendre, elle tombe dans un piège et la vielle Baba Yaga ne souhaite qu'une chose, faire de la petite son repas de midi.

Elle dit à sa servante : "Va me chauffer les bains, chaud, très chaud, lave ma nièce et tâche de bien lui ramollir les os, je vais la frire ce midi".

La petite, suivant les conseils de sa tante, va se sortir de la maison, puis du jardin en offrant objet et nourriture à tous les personnages rencontrés dans l'histoire. Le Chat d'abord, qui pour la remercier lui offre d'autre objets utiles puis les chiens féroces, la grille rouillée du jardin, le bouleau menaçant. Chacun va accepter les offrandes de la petite et l'aider dans sa fuite, faisant ainsi acte d'infidélité à la Baba Yaga, trop longtemps tortionnaire envers eux.

Et la Baba Yaga va leur faire payer cher cette trahison ...

"La voilà qui se met à battre le chat. Et que je te rosse, et que je te cogne, et que je te rogne et que je te grogne : "Sale chat, sale voleur, comment as-tu osé laisser la fille sans lui crever les yeux ?" Le chat essuie ses larmes et dit à la Baba Yaga d'une vois de personne : "Je te sers depuis tant d'année, Yaga, jamais tu ne m'a jeté la moindre rognure d'os, et, elle, c'est du jambon qu'elle m'a donné"."

La Baba Yaga se lance ensuite sur les traces de la petite ... "La Baba Yaga file dans son mortier, rame du pilon et, du balai, efface ses traces."

Mais la fillette parvient à lui échapper grâce aux objets donnés par le chat qui mettent entre elle et l'ogresse une rivière puis une forêt profonde et infranchissable.

La fillette parvient ainsi à retourner auprès de son père à qui elle raconte sa mésaventure. Ce dernier décide alors de se séparer de la marâtre traitresse.

Babayaga, symbole slave

Pour mon avis ...

J'ai aimé cette version pour ses illustrations très épurées, aux couleurs vives mettant en scène des personnages en habit traditionnel.

La trame du conte est très bien préservée, un jeune héros, un but, des épreuves à relever en usant de ruse, d'habilité, d'intelligence ou de gentillesse, un ennemi symbolique, des personnages aidant, des objets magiques, un récit basé sur la répétition de formules.

J'ai aimé le texte aussi, dense et détaillé mais avec justesse. Il est rimé aussi assez souvent ce qu'il rend la lecture encore plus agréable, en particulier à voix haute, comme c'est la tradition pour un conte. Les tournures sont riches ainsi que le vocabulaire choisit.

J'aime que l'ensemble ne soit pas édulcoré (sans être trop cru non plus), comme c'est souvent le cas aujourd'hui dans les adaptations où l'on oubli la fonction principale du conte pour l'enfant, matérialiser ses plus grandes peurs pour mieux les affronter et les vaincre !

Challenge "Je lis aussi des albums" - lecture 80/100 - très belle lecture -

Babayaga, Taï-Marc Lethanh et Rébecca Dautremer, Gautier Languereau, 2003

Babayaga, symbole slave

Pour l'histoire ...

Quelques variantes dans cette adaptation et quelques jolies trouvailles viennent enrichir l'histoire, plus romancée que contée ici.

Pour commencer, on "revient" sur l'enfance de Babayaga, le passé compliqué d'un petite fille qui, à cause de son unique dent, a subit les moqueries répétées de tous ses camarades. Inconsolable, elle est devenue aigrie, terriblement méchante, puis complètement sauvage.

On y découvre ses premières expériences culinaires, les chiens d'abord, pour apprendre à mastiquer comme les autres enfants malgré son unique dent. Puis, "comme elle avait une dent contre les autres enfants, elle en mangea quelques-uns. Elle trouva ça plutôt goûteux et décida de devenir ogresse (au grand désespoir de Papayaga et Mamayaga qui la chassèrent dans une forêt de ténèbres, loin du foyer familial)."

C'est ainsi qu'elle se mit à déguster les enfants à toutes les sauces et décida d'ouvrir un restaurant "au bambin qui rissole", à la carte des plus originales : "Tarte aux mouflets", "rôtis de mômes aux citrons confits", "boudin de mioches aux olives".

Mais comme personne ne vint jamais dans son auberge, elle devint de plus en plus méchante et de plus en plus affamée... elle s'adressa alors à sa sœur, devenue une horrible marâtre, espérant qu'elle lui fournisse de la chair fraiche...

On revient alors au conte classique avec notre fillette, ici nommée Miette, envoyée par la marâtre chez sa sœur, la Babayaga pour chercher du fil et une aiguille. L'aide que reçoit alors la fillette n'est pas celle de sa tante mais d'un crapaud, emprunté à d'autres contes. C'est lui qui lui conseille de se munir de certains objets et nourritures pour affronter la terrible Babayaga.

Arrivée à destination on découvre une ogresse bien différente du conte précédent, immense, énorme, plus maline aussi, elle tente d'attendrir la petite pour mieux la berner. Son intérieur est sombre mais plutôt bien arrangé. Ici point de servante mais toujours un chat affamé, deux chiens féroces, un arbre terrifiant (un saule et non un bouleau), et un vieux portail grinçant. Le reste de la fuite comporte les même épreuves. Mais Babayaga n'a plus de pouvoir magique. Point de mortier, de pilon ou de balai pour tenter de rattraper la petite.

Miette revient auprès de son père, lui raconte sa mésaventure. Il chasse la Marâtre. Quand à Babayaga, elle termine devant une assiette vide, furieuse d'avoir une fois de plus été bernée par un enfant, et plus affamée que jamais.

Babayaga, symbole slave
Babayaga, symbole slave

Pour mon avis ...

Un bel objet par son grand format, son texte agréable et joliment mis en page et ses grandioses illustrations de Rebecca Dautremer qui absorbent complètement le regard.

Un travail toujours aussi envoûtant, d'une grand précision et d'une belle imagination tout aussi séduisant pour les petits que pour les grands.

Une réadaptation réussie avec de bien belles trouvailles qui fonctionnent, qui apportent une toute nouvelle vie à ce conte sans en modifier son attrait.

Enfin, voici un petit clin d'oeil amusant, aux Matriochkas que l'on distingue posées sur le rebord de fenêtre de Babayaga, à la dernière page de l'album et qui me permet de vous emmener en douceur vers le prochain album ...

Babayaga, symbole slave

Challenge " Je lis aussi des albums" - lecture 81/100 - Très belle lecture -

Matriochka, Sandra Nelson et Sebastien Pelon, Père Castor, Flammarion, 2009

Babayaga, symbole slave

Pour l'histoire ...

On retrouve la Babayaga mais, comme je l'expliquais en introduction, utilisée dans un autre conte.

Elle garde ses caractéristiques principales, vieille, laide, méchante et ogresse. Elle vit toujours seule au milieu de la forêt, dans son isba posée sur pattes de poulet.

L'histoire nous raconte la vie de Natacha, Ivan et leurs 5 filles, belles, douces, comme des poupées.

"D'une saisissante ressemblance, seule la taille successive les distinguait ".

L'histoire nous dit que chacune des 5 filles possède un donc particulier, cuisine, chant, broderie, échecs et télépathie.

Un jour, les parents annoncèrent aux fillettes qu'ils n'avaient plus de quoi les nourrir toutes les 5, que la plus grande devrait donc allait travailler chez la Babayaga.

Connaissant sont appétence pour la chair enfantine les 4 plus petites prirent peur pour leur ainée.

La plus grande, courageuse et résignée accepta son sort mais, n'ayant jamais été séparées, les 4 autres, décidèrent le la suivre en se cachant sous les robes les unes des autres. Natacha pour conjurer le sort fabriqua pour sa fille une poupée lui ressemblant trait pour trait, sensée la protéger des dangers.

C'est ainsi que Katérina et ses 4 soeurs cachées, arrivèrent chez la terribe Babayaga.

Quand Natacha s'apperçut de l'absence de ces 4 autres filles, elle confectionna 4 autres poupées pour les protéger, qu'elle posa côte à côté sur sa cheminée.

Babayaga, symbole slave

Chaque jour l'ogresse donne à Katérina les tâches les plus fastidieuses, promettant de la manger si elle échoue :

"Nettoie mon isba et prépare-moi un bon repas. Je serais de retour avant la nuit tombée :

Par le froid et par la pluie,

Par le grand vent de minuit,

Si tout n'est pas bien rangé,

Oui, Da, je te mangerai."

Mais chaque nuit, quand l'ogresse rentre, elle ne peut que constater à regret, l'étonnante efficacité de la fillette.

C'est grâce aux dons que la nature a donné à chacune et leur incroyable solidarité, que les fillettes se sortent tous les jours des épreuves de l'ogresse.

Un jour, Tatiana, la télépathe, lie dans les pensées de Babayaga, qu'elle n'est en fait qu'une Tsarine bannie pour ne pas avoir pu donner d'enfant et changée en ogresse par une méchante sorcière. Elle découvre aussi que le sort sera rompu le jour où elle se fera battre aux échecs par un enfant.

C'est donc au tour de Vera de prendre le relais. Elle gagne évidemment la partie mais aussi la fortune amassée par l'ogresse.

Ainsi la tsarine fut libérée de son sortilège, redevint une belle jeune fille et alla retrouver les siens. En souvenir, Natacha lui donna les poupées.

"Confie-leur ton vœux le plus cher et tu seras exaucée."

Bien sûr la Tsarine souhaita un enfant, que tout le monde surnomma Matriochka, une enfant qui qui ne se séparait jamais des 5 petites poupées.

"Devenue adulte elle se mit à en fabriquer. Elle leur donna son nom, et depuis, les poupées Matriochka symbolisent la fertilité, et sont aimées des enfants du monde entier."

Babayaga, symbole slave

Pour mon avis ...

J'aime beaucoup les contes qui nous livrent aussi quelques secrets traditionnels.

Et j'aime par dessus tout les Matriochka.

Une amie m'en a offert quand j'ai eu ma fille, me souhaitant ainsi une famille nombreuse ... on ne peut pas dire que cela soit un franc succès mais ma fille a fait de ces poupées son jouet favori depuis toute petite...

Chaque enfant possède en lui d'infinies richesses aux grands pouvoirs, qui ne demandent parfois qu'à être valorisées ... voilà bien ce que je retiens de ce très beau conte, bien écrit et illustré avec beaucoup de finesse.

NB : après mise en ligne, Blandine, que je vais désormais appelé Œil de Lynx a repéré que c'est le même couple auteur/illustrateur que l'album de la Befana que j'ai présenté la semaine dernière ... à découvrir par là CLIC

Grand merci Copinaute, je vois que tu suis mon blog avec attention ... ;-)

Trois albums lus pour le Challenge "Je lis aussi des albums", couplé tous les samedis d'Octobre au Challenge Halloween, auquel je participe depuis le début du mois et qui concoure pour une Box de Pandore.

Babayaga, symbole slave

Je vous laisse maintenant découvrir les albums proposés aujourd'hui par Blandine, 3 sorcières pleines de PEPS à découvrir par là :

J’espère que vous aurez pris comme moi plaisir à découvrir ou re-découvrir cette Babayaga... cela me donne en tout cas très envie de lire et pourquoi pas vous présenter un de ces jours d'autres adaptations. A très vite, en attendant, belles lectures.

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L
J'aime bien les illustrations du dernier album que je ne connaissais pas. J'ai celui de Rebecca Dautremer à la maison, je ne l'ai pas encore lu. Ce sera pour l'année prochaine je pense :) Je connais mal le personnage de Babayaga pour l'instant, ton billet m'a déjà appris beaucoup de choses (la maison qui tourne sur elle même et les ossements tout autour sont bien effrayants).
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B
jolie collection de Baba Yaga :) Merci pour ces découvertes. J'ai vu/lu plusieurs contes où l'on voit Baba Yaga, mais je ne connaissez pas sur histoire ^^
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